Le Social Business à HEC Paris fête ses 15 ans !
2023 marque le 15ème anniversaire du Certificat Inclusive and Social Business d'HEC Paris, une étape importante dans le monde du social business. Pour l’occasion, le centre Inclusive Economy (S&O) d’HEC Paris a organisé une table ronde réunissant des acteurs clés et des visionnaires dans ce domaine, dont le professeur Muhammad Yunus, lauréat du prix Nobel de la paix.
Organisé à la Albert School à Paris, l'événement a non seulement célébré la longévité du programme, mais aussi son impact profond sur la société. Bénédicte Faivre-Tavignot, professeure associée à HEC Paris, l'une des forces motrices du certificat, a lancé la discussion en évoquant la création du programme et son objectif général : explorer la manière dont les entreprises peuvent avoir un impact positif sur la vie des gens. Cela fait écho aux propos tenus par le professeur Yunus : « Il y a deux façons de faire du business : l'une consiste à gagner de l'argent, l'autre à faire du bien aux gens. »
La genèse d'une vision
Lancé il y a 15 ans, le Certificat Inclusive and Social Business affiche depuis toujours la même ambition « Notre objectif était de favoriser un état d'esprit et une culture qui donnent la priorité au ‘S’ dans ESG parmi nos étudiants et, in fine, d’encourager les acteurs du monde de l'entreprise à relever les défis sociaux », a expliqué Bénédicte Faivre-Tavignot. Le programme a démarré grâce au lancement de la Chaire Social Business / Entreprise & Pauvreté en 2008, avec le soutien de personnalités telles que Laeticia d'Ornano ou Emmanuel Faber.
Dans le prolongement de cette chaire, a été créé l'Inclusive Economy Center, dirigé par Marieke Huysentruyt, professeure associée à HEC Paris et chercheuse renommée dans le domaine de l'économie comportementale.
Le professeur Yunus, le catalyseur du Certificat Inclusive and Social Business
« Tout au long de cette aventure, l'objectif du Certificat a été d'explorer comment les entreprises pouvaient faire du bien aux gens, en s'intéressant évidemment aux plus vulnérables, et comment leur donner accès aux biens et services essentiels, ainsi que de leur donner accès à un travail décent », a déclaré Bénédicte Faivre-Tavignot. Ce parcours de 15 ans n'aurait pas été possible sans l'implication du professeur Muhammad Yunus.
Le professeur Yunus a en effet été une présence inébranlable, inspirant le changement et favorisant la prise de conscience. Ses efforts incessants pour mobiliser les chefs d'entreprise du monde entier ont joué un rôle déterminant dans l'évolution du programme. Tous les intervenants de la table ronde ont exprimé leur gratitude pour le rôle essentiel qu'il a joué dans la réussite du programme.
L'impact des collaborations
La table ronde a mis en lumière le pouvoir de la collaboration entre le monde académique et les entreprises. Des représentants d'entreprises telles que Danone, Schneider Electric et Renault ont fait part de leur appréciation de l'impact du programme sur leur organisation au fil des ans. Ces collaborations leur ont permis d'adopter une approche plus sociale et responsable dans leurs entreprises, ce qui a entraîné des changements significatifs.
Martin Hirsch, président de l'Institut de l'Engagement et vice-directeur exécutif de Galileo Global Education, figure emblématique des débuts du programme, a rappelé comment tout a commencé il y a 15 ans. Le mélange unique du travail de terrain de l'Action Tank Entreprise et Pauvreté et de recherche académique avec HEC Paris était un concept novateur, soulignant l'importance d'évaluer la cohérence et l’impact des initiatives sociales des entreprises. Il a souligné le rôle du programme, qui incite les étudiants à trouver un sens à leur vie, à remettre en question les modèles économiques dominants et à explorer des solutions alternatives.
Gilles Vermot Desroche, senior vice-président citoyenneté & affaires institutionnelles à Schneider Electric, partenaire historique de l'aventure social business à HEC, a partagé son point de vue sur l'impact transformationnel du programme et de ses interactions avec le professeur Yunus sur sa propre façon de penser et d'aborder de nouveaux business models. De nombreuses initiatives et projets sociaux de Schneider Electric ont affiché des résultats tangibles, mais ils ont surtout facilité le transfert de compétences à des personnes dans le besoin. « Nous n'avions jamais envisagé que notre principale responsabilité soit de résoudre le problème des personnes qui n'ont pas accès à l'électricité. Notre devoir est de comprendre comment nous pouvons apporter ce changement. Au-delà de la technologie, de l'innovation ou des produits, notre responsabilité est d'encourager l'entrepreneuriat local et de comprendre l'impact que l'accès à l'électricité peut avoir sur la vie des gens. » Gilles a également parlé de l'importance du mentorat, qui aide les gens à devenir plus ambitieux, et de la nécessité pour les chefs d'entreprise de s'engager dans des partenariats sincères et significatifs avec les écoles.
« Nous n'avons jamais envisagé que notre principale responsabilité soit de résoudre le problème des personnes qui n'ont pas accès à l'électricité. Notre devoir est de comprendre comment nous pouvons apporter ce changement. Au-delà de la technologie, de l'innovation ou des produits, notre responsabilité est d'encourager l'entrepreneuriat local et de comprendre l'impact transformateur que l'accès à l'électricité peut avoir sur la vie des gens. »
Le puissant témoignage d'un ancien élève
Les étudiants du certificat restent ses meilleurs ambassadeurs. Yannis Zaccharie Bekhti, un ancien étudiant, a partagé un témoignage inspirant sur son parcours post-certificat, en mettant l'accent sur trois enseignements clés du programme :
- N’ayez pas peur de remettre en question le statu quo et de rechercher des solutions innovantes : « Il n'y a aucun mal à être divergent. »
- Soyez créatif et inventez votre propre solution lorsqu'aucune solution n'est disponible.
- Soyez le changement que vous voulez voir : « Soyez humble, mais en même temps, soyez suffisamment ambitieux pour oser prendre des risques. »
Ces apprentissages clés l'ont amené à créer une société de production cinématographique alors que personne ne voulait produire ses histoires. Plus récemment, Yanis a lancé CLIMAP, le Climate Investment, Mobilization and Access Partnership, une ONG qui vise à faciliter le financement de toutes les initiatives en faveur du climat en Afrique, en Asie et au Moyen-Orient, là où ces investissements sont les plus nécessaires.
Professeur Muhammad Yunus : Leçons sur la pauvreté et l'entrepreneuriat social
La table ronde a également été l'occasion d'une conversation avec le professeur Muhammad Yunus, prix Nobel de la paix 2006 avec la Grameen Bank. Le professeur Yunus est réputé pour son travail de pionnier dans le domaine du microcrédit et de l'entrepreneuriat social.
Il a commencé par souligner l'idée fausse selon laquelle la pauvreté est la faute des pauvres, en insistant sur le fait qu'elle est le résultat de problèmes sociétaux systémiques et d'un manque d'opportunités. Il a fait part de son expérience avec des personnes démunies et de l'importance de libérer leur potentiel en surmontant les freins liés à la peur et l'insécurité.
S’attaquer aux sujets de santé au Bangladesh
Le professeur Yunus a expliqué que la Grameen Bank s'est principalement concentrée sur les problèmes de santé au tout début, toujours sous un angle novateur. Pourquoi ? Parce que la santé est une priorité, surtout lorsqu'il s'agit de celle des enfants.
Ils ont commencé par les toilettes, car l'absence de toilettes est synonyme de prolifération des maladies. « L'une des règles que nous avons établies à la Grameen Bank était de demander aux personnes désireuses d'adhérer à la Grameen Bank de creuser un trou et de l'utiliser plutôt que d’aller dans la nature. »
« Les femmes ne font pas d’embrassades au Bangladesh, mais elles en font quand elles me voient parce que nous les avons sauvées de la torture d’attendre jusqu'à la nuit tombée.»
Au départ, les gens étaient réticents, mais ils savaient que pour obtenir leur argent, ils devaient suivre cette règle. Ensuite, la Grameen Bank a accordé des prêts pour des toilettes afin que les gens puissent avoir leurs propres toilettes. Cela a beaucoup apporté aux femmes et les a aidées à retrouver leur dignité. Le professeur Yunus explique que « les femmes ne font pas d’embrassades au Bangladesh, mais elles en font quand elles me voient parce que nous les avons sauvées de la torture d’attendre jusqu'à la nuit tombée. » La banque a également créé une entreprise qui produit des toilettes dans le village, ce qui permet d'éliminer les coûts de transport.
Un impact dans le monde entier !
Cela ne s'arrête pas là. La Grameen Bank a créé des centres de soins, des hôpitaux, et même un hôtel à côté de l'hôpital pour que les gens puissent se rendre à leurs rendez-vous quand ils le souhaitent au lieu de séjourner plusieurs jours à l'hôpital et de payer le prix fort. Ils ont également lancé une école d'infirmières de renom pour s'assurer que les Bandagleshi n'aient pas besoin d'aller à l'étranger pour se faire soigner.
Dernièrement, ils ont travaillé sur un système de santé numérique permettant aux gens d’accéder à tous les services de santé par le biais d'une application, avec pour objectif de rendre les soins de santé accessibles et pratiques à tous, et en particulier aux femmes enceintes. « Nous voulons créer un service de santé complet, de sorte que lorsque les gens quittent l'hôpital, celui-ci les suive jusqu'à leur domicile, où qu'ils se trouvent. »
Partager l'histoire significative de la Grameen Bank au Bangladesh n'est que la partie émergée de l'iceberg des actions menées par le professeur Yunus. Son influence s'est étendue bien au-delà du Bangladesh et du secteur de la santé. Aujourd'hui, des personnes du monde entier, de toutes les générations et de tous les milieux, continuent d'être inspirées par ses actions de lutte contre la pauvreté.
« Soyez enthousiastes face à la multitude de problèmes dans le monde, considérez-les comme des opportunités d'innovation et abordez-les sous différents angles ! »
Pour conclure sur ces projets à fort impact, le professeur Yunus a encouragé le public à considérer les défis comme des opportunités d'innovation, de résolution de problèmes et de créativité. « Soyez enthousiastes face à la multitude de problèmes dans le monde, considérez-les comme des opportunités d'innovation et abordez-les sous différents angles ! », a lancé le professeur Yunus. Ce dernier est convaincu que les solutions sont souvent enfouies dans les problèmes eux-mêmes, attendant d'être découvertes. Enfin, Muhammad Yunus a également reconnu le rôle pionnier d'HEC Paris en matière de social business dans le monde académique et sa légitimité puisque l'école s'est engagée sur ce sujet depuis plus 15 ans, et continue sur sa lancée.