La responsabilité sociale des entreprises, la nouvelle norme
On estime que la population mondiale atteindra 8 milliards d’individus d’ici 2023 : partager des ressources limitées de façon efficace devient donc une nécessité. Pour le Professeur Frédéric Dalsace, la responsabilité sociale représente bien plus qu’une opportunité pour les entreprises, c’est la nouvelle norme.
D’après un entretien avec le professeur Frédéric Dalsace, de la Chaire Social Business de HEC Paris, ancien directeur pédagogique de l’Executive MBA.
UNE QUESTION D’EFFICACITÉ
« Il s’agit d’utiliser plus efficacement nos ressources. Nous devons repenser l’utilisation que nous en faisons ».
Avec la convergence de la raréfaction des ressources naturelles et de l’augmentation de la population, « le monde ne sera bientôt plus durable. L’impact de l’accroissement soutenu de la population mondiale fait baisser le ratio des ressources par personne ».
La solution, selon le professeur Dalsace, serait d’une « économie de l’ère des cowboys à celle des vaisseaux spatiaux ». Dans l’économie du Far West, un petit nombre de personnes peuvent profiter de ressources abondantes. Au contraire, l’économie spatiale repose sur un système aux ressources limitées, et il faut alors être attentif à l’utilisation de chacune d’entre elles. Dans ce modèle, chacun a un rôle à jouer, poursuit le professeur Dalsace, et la responsabilité sociale incombe aux entreprises.
Uber, Lyft et BlaBlaCar, par exemple, ont transformé un système inefficace (chaque personne conduisant sa propre voiture) pour l’améliorer. « Ils rendent plus efficace l’utilisation d’atouts existants, analyse le professeur Dalsace. C’est capital. »
POURQUOI ENVISAGER LA RSE EN TANT QU'ENTREPRISE ?
« La RSE peut avoir un effet positif sur l’entreprise car elle capitalise sur cinq leviers essentiels », nous dit le professeur Dalsace.
- Premièrement, en se concentrant sur des marchés inexploités et négligés, les entreprises peuvent trouver de nouveaux clients et générer un plus gros volume de ventes et de revenus.
- Deuxièmement, être socialement responsable donne aux entreprises un « permis d’exploitation ». Les entreprises perçues comme dignes de confiance et fiables sont plus susceptibles d’être choisies que celles perçues comme des « mauvais citoyens ».
- Troisièmement, la RSE est « un levier crucial de l’innovation ». Développer des produits plus accessibles aux personnes dont les besoins ne sont pas encore satisfaits par le marché force les entreprises à se montrer plus créatives et à trouver des solutions innovantes.
- Quatrièmement, la responsabilité sociale compte pour les employés. Elle « joue un rôle clé dans le recrutement des meilleurs talents, notamment parmi les jeunes entrepreneurs ».
- Enfin, la RSE construit un capital social. En montrant systématiquement que la RSE est importante, on en fait une sorte « d’assurance », de sorte que lorsque la situation se dégrade – ce qui arrive inévitablement à un moment donné - les entreprises peuvent démontrer leur engagement social.
ARGUMENTS ÉTHIQUES ET TRANSFORMATIFS EN FAVEUR DE LA RSE
« La dimension économique est le point de départ de la RSE, explique le professeur Dalsace, mais il y a deux autres aspects à prendre en compte : l’aspect moral et l’aspect transformatif ».
La dimension éthique sous-tend que les entreprises s’engagent à éliminer les « pénalités de pauvreté », c’est-à-dire les coûts supplémentaires que doivent supporter les personnes ayant de faibles revenus.
Nous pouvons construire un monde meilleur en développant des modèles économiques alternatifs spécialement pour les consommateurs à faibles revenus, poursuit le professeur Dalsace. Renault, par exemple, possède une organisation à but non lucratif qui permet de financer la réparation des voitures de ceux qui ne peuvent pas se le permettre.
La dimension transformative de la RSE réside dans le fait que « les entreprises vont devoir assumer leur part de responsabilité dans ce changement du monde ».